Une thérapeutique puissante sur mesure
En Chine, les plantes médicinales sont considérées comme un « trésor national » et sont très couramment utilisées tant à titre préventif que curatif. En effet dans son pays d’origine, la pharmacopée chinoise est utilisée comme thérapie prioritaire. Elle y est considérée comme plus puissante que l’acupuncture.
La pharmacopée chinoise est un système médical traditionnel qui a été développé en Chine depuis des milliers d’années. Elle repose sur une approche holistique de la santé, qui vise à rétablir l’équilibre entre le corps et l’esprit. Elle est d’abord utilisée pour maintenir la santé mais aussi pour soigner. C’est une discipline vivante qui continue d’évoluer au fil du temps.
La pharmacopée chinoise se fonde sur un ensemble de principes et de théories qui sont la base de la Médecine traditionnelle chinoise (MTC). Les plus importants sont : le Yin et le Yang, le Qi (énergie vitale), ainsi que les Cinq Éléments (bois, feu, terre, métal et eau). Selon ces principes, la santé est le résultat d’un équilibre harmonieux entre ces forces et éléments. Tout déséquilibre ou obstruction du flux d’énergie entraîne la maladie.
Le médecin chinois, avant de prescrire une préparation de plantes, effectuera un diagnostic pour évaluer les déséquilibres à l’origine des symptômes dont se plaint son patient. Chaque prescription, même si elle se base sur des recettes existantes appelées formules, sera ainsi adaptée pour chaque patient en fonction de son terrain et de son tempérament.
Plus de 100’000 formules recensées
Depuis l’origine de la pharmacopée chinoise, de nombreuses formules ont été mises au point par de grands médecins. Certaines ont été enrichies, de nouvelles ont été mises au point au fil du temps. Il existe ainsi de nombreux traités recensant ces formules. Par exemple, Les Prescriptions de l’Aide universelle de Zhu-su, sous la dynastie Ming, contenait 61’739 formules de l’Ancienne Chine. Plus récemment, le Dictionnaire des Ordonnances chinoises traditionnelles, compilé par l’Université de MTC de Nanjing, recense toutes les formules existantes depuis le début de la MTC. On y trouve plus de 100’000 prescriptions !
Une formule est toujours constituée de plusieurs plantes ou substances. En effet, la pharmacopée chinoise mise sur l’effet conjugué de plusieurs plantes pour créer un effet de synergie. Cela permet aussi de minimiser les effets secondaires que pourrait générer la prise d’une plante unique en grande quantité, ou d’annihiler certains effets toxiques d’une plante. Les différentes substances pourront agir sur plusieurs aspects de la maladie ou sur différents organes.
La formule traite ainsi la maladie avec l’objectif d’équilibrer l’ensemble du corps et de corriger les déséquilibres sous-jacents. Dans cet esprit, la formule sera adaptée à chaque patient pour répondre au mieux à ses troubles spécifiques. De même, en fonction de l’évolution de la maladie ou des changements dans l’état de santé du patient, les proportions et les plantes utilisées peuvent être ajustés en fonction de cette évolution.
Des milliers de plantes et substances
La pharmacopée chinoise recèle quelques milliers de substances, dont 300 environ sont couramment utilisées. Ces substances proviennent majoritairement de plantes, mais peuvent inclurent aussi d’autres éléments. Par exemple, on trouve des substances minérales (le cinabre, le soufre, la magnétite etc.), des substances animales (os, coquillages, nids d’oiseaux, poudre de perles etc.), des insectes (fourmis, vers à soie, scorpions etc.). Les préparations médicinales peuvent aussi inclure d’autres substances comme la cire d’abeilles, le miel, les substances résineuses. La liste n’est pas exhaustive.
Les plantes médicinales sont sélectionnées en fonction de leurs propriétés spécifiques, de leur saveur, de leur nature, et de leurs interactions avec les organes du corps.
La pharmacopée chinoise tient compte des contre-indications et des interactions potentielles entre différentes herbes médicinales.
Une formule est élaborée en respectant notamment « la combinaison particulière du Monarque, du Ministre, de l’Assistant et du Guide ». Le remède Monarque est l’ingrédient essentiel de la formule, il détient le rôle curatif du principal symptôme visé. Le Ministre vient renforcer l’effet curatif du Monarque ; l’Assistant coopère avec les deux premiers pour améliorer leurs effets thérapeutiques et permettre à ceux-ci d’être mieux tolérés. Enfin le remède Guide dirige les effets des autres herbes vers les organes à traiter et régule les propriétés des autres herbes.
La pharmacopée chinoise utilise différentes méthodes de préparation des herbes médicinales telles que les décoctions (Tāng), les infusions (Zhǒu), les poudres (Sǎn), les teintures (Jiǔ) et les pilules/comprimés (Wàn). Les décoctions sont les plus courantes.
Une thérapeutique peu propice à l’automédication
Au vu de ce qui vient d’être exposé, cela peut paraître une évidence. Mais rappelons-le. La pharmacopée chinoise est efficace, mais elle doit être prescrite à bon escient, après un diagnostic de médecine chinoise. En effet, une maladie, selon les critères de la médecine occidentale ou allopathique, pourra recéler différents tableaux pathologiques au regard de la médecine chinoise. C’est pourquoi chaque patient se verra prescrire une formule adaptée à son cas.
Par ailleurs, la médecine chinoise considère qu’une maladie est évolutive dans le temps. C’est pourquoi les traitements varient rapidement au fil des soins. De jour en jour, un patient voit son état évoluer. Les plantes médicinales sont alors adaptées en fonction du diagnostic évolutif du patient. C’est pourquoi, même si un patient a pris une formule il y a quelques semaines ou mois, et que celle-ci lui a été bénéfique, elle ne sera pas forcément adaptée si certains symptômes, en apparence similaires – reviennent. Il lui est vivement conseillé de consulter à nouveau son médecin chinois.
Des remèdes au gôut amer ?
Si la pharmacopée est la plus utilisée des thérapeutiques de la médecine chinoise, elle le doit à son efficacité. Le Chinois est pragmatique et n’est pas là pour se faire plaisir mais bien pour se soigner. Nombre d’Occidentaux sont plus chatouilleux sur l’aspect confort d’une thérapeutique. Oui ça doit soigner efficacement, mais le plus agréablement – ou le moins désagréablement – possible.
Si l’acupuncture fait peur à certains, c’est souvent bien pire avec les décoctions chinoises ! D’aucuns ne se sentent même pas le courage d’en avaler, quand d’autres les jettent à la poubelle. Les nez et palais occidentaux sont sans-doute devenus trop difficiles pour leur propre santé…
Au-delà des goûts et dégoûts de chacun, le goût d’une préparation est très variable d’une formule à l’autre, allant du plutôt sucré au très amer. La décoction se consomme en général deux fois par jour. La préparation d’une décoction requiert un certain temps qui peut aussi faire reculer certains. Mais de nombreuses pharmacies chinoises les cuisent aujourd’hui et les livrent sous-vide à leurs clients.
0 commentaires