Comprendre la douleur

Comprendre la douleur

Les syndromes tòng et bì

La douleur est le premier motif de consultation et représente près de deux tiers des consultations médicales, notamment en Europe. Elle est donc un élément essentiel et délicat à prendre en compte dans les soins aux patients.

De manière générale, la douleur est quelque chose de désagréable qui se passe dans le corps. Mais c’est aussi en même temps, une expérience mentale personnelle et donc subjective.

L’association Internationale pour l’Étude de la Douleur (IASP) décrit la douleur comme « une expérience sensorielle ou émotionnelle désagréable associée à un dommage tissulaire présent ou potentiel. »

Ce qui signifie que la douleur, en plus de signaler un dommage corporel (potentiel ou présent), est au même titre que son opposé, le plaisir, une attitude subjective émotionnelle, qui déclenche et met en forme des comportements. La douleur n’est donc ni une simple perception ni une sensation qui serait purement physique. C’est fondamentalement un état mental.

Un blocage d’énergie

Selon la médecine traditionnelle chinoise (MTC), la douleur est généralement le signe d’un blocage d’énergie. Cependant, celui-ci varie en fonction de la localisation de la douleur et de ses causes. La MTC classifie la douleur selon :

  • qu’elle est permanente ou intermittente ;
  • qu’elle correspond à des engourdissements douloureux avec gonflement au niveau des articulations ;
  • qu’elle est due à des surpressions, des spasmes, une irradiation etc.

Le problème est complexe. Le traitement de la douleur se fera en désobstruant les méridiens bloqués, en expulsant les excès ou les mucosités ainsi qu’en libérant les stagnations du sang.

Pour les douleurs qui s’inscrivent dans le temps, l’acupuncture et/ou la phytothérapie chinoise sont utilisées pour réduire le niveau de douleur et la soulager. On recourt aussi largement à la moxibustion, au massage et aux ventouses pour la soulager. La douleur se manifeste rarement seule ; elle est généralement symptomatique d’un déséquilibre d’énergie que le diagnostic détectera.

Selon la MTC, le concept de douleur peut être divisé en deux syndromes principaux : tòng (vide) ou bì (blocages).

Le syndrome Bì

Les Bì sont des obstructions douloureuses des méridiens dues à une association de trois pervers aussi appelés « les trois démons » : le Vent, le Froid, l’Humidité.

Le syndrome Bì se loge au niveau de la peau, des muscles, des vaisseaux, des tendons, des os et des méridiens.

Une mauvaise hygiène de vie ainsi que de mauvaise habitude sociales ou alimentaires peuvent entraver la circulation du Sang et du Qi dans les méridiens, favorisant ainsi l’apparition de maladies de type Bi.

Citons notamment :

  • des horaires anarchiques de lever et de coucher,
  • le surmenage,
  • un habitat froid ou humide, exposant au Froid, au Vent et à l’Humidité,
  • un abus d’alcool,
  • une alimentation trop riche ou insuffisante,
  • une alimentation excessive qui blesse le Jing et le Sang,
  • des émotions intenses vécues avec excès (Colère, Joie, Choc émotionnel, Soucis, Tristesse, Excès de Réflexion, Peur)
  • des hématomes ou une stagnation de sang après traumatisme externe.

Le syndrome Tòng

Le syndrome Tong, lui, provient le plus souvent de causes internes.

Il se localise dans les Cinq Organes et les Six Entrailles. On le trouve également dans « les Entrailles particulières » : Cerveau, Moelle, Os, Vaisseaux, Vésicule biliaire et Utérus. On diagnostique ici souvent un vide de Yin, un vide de Yang, un vide de Qi ou un vide de Sang (ou une combinaison des quatre).

Les fonctions du corps humain, qu’elles soient organiques ou psychiques, sont liées entre elles par un perpétuel mouvement. Tout ralentissement ou blocage (痹 – bì) du mouvement dans l’une ou l’autre des fonctions du corps peut amener de la douleur.

La douleur est par conséquent un vaste sujet dans la mesure où elle recouvre de multiples réalités. On doit donc distinguer :

  • le lieu de sa manifestation (à l’extérieur ou à l’intérieur du corps),
  • son origine : externe (au niveau des méridiens) ou interne (organes [qìguān] et viscères [zāngfǔ]),
  • son type : Vide ou Plénitude
  • sa nature : aiguë ou chronique etc.

Là aussi la liste est longue, et prendre un anti-inflammatoire ne résoudra rien à l’origine du problème. Il est primordial de considérer d’abord la douleur comme une sonnette d’alarme qui doit attirer notre attention sur un changement à opérer dans notre mode de vie.

Les règles douloureuses

respiration profonde

Les femmes sont très nombreuses à expérimenter des douleurs avant et/ou pendant leurs menstruations. Selon une étude de 2005, 50 à 70 % des adolescentes ont des dysménorrhées permanentes ou occasionnelles. Pour 15 à 20 % d’entre elles, ces douleurs les obligent même à limiter leur activité voire à s’aliter. Pire, de nombreuses femmes vivent ces douleurs comme une normalité, presqu’une fatalité.

Or, il n’y a rien de normal à souffrir ainsi. Ces douleurs sont signes de déséquilibres énergétiques, et la plupart du temps de stagnation de sang et d’énergie au regard de la MTC. Ainsi, en restaurant le flux d’énergie par l’acupuncture et/ou la pharmacopée, la médecine chinoise permet de venir à bout de ces douleurs.

Il s’agira notamment de mobiliser le qi et le sang, voire de nourrir le sang et de tonifier le Qi. Un diagnostic personnalisé permettra de traiter chaque patiente de façon adéquate selon la nature des déséquilibres observés.

Grâce à ces traitements, les femmes peuvent enfin vivre leurs cycles dans le confort et la sérénité.

Le gros intestin

Le gros intestin

Elimination et lâcher prise

Le Gros intestin (大肠 Dà cháng) est en médecine chinoise associé à l’élément Métal, à la saison de l’automne et à l’émotion de tristesse. Il est couplé au Poumon, organe yin du Métal.

La fonction principale du gros intestin est de recevoir les aliments ingérés et transmis par l’intestin grêle. Après avoir absorbé une partie des liquides, il excrète les selles.

Le Gros intestin, gouverné par la Sécheresse, contrôle les liquides. Autrement dit, il absorbe la quantité de liquides nécessaire afin de n’être ni trop sec ni trop humide. En effet, s’il est trop sec cela génère de la constipation, et s’il est trop humide, de la diarrhée.

Mouvement et acheminement

Après avoir reçu la nourriture digérée de l’Intestin Grêle, le gros intestin la transforme en selles et s’assure :

  1. que les selles circulent correctement,
  2. qu’elles sont acheminées vers le bas.

Le Gros intestin est en MTC le ministre en charge de la circulation et de l’acheminement. Le mouvement du Qi du Gros Intestin est donc clairement un mouvement descendant.

Si ce mouvement s’arrête (stagnation), le Qi affecte alors le Gros Intestin et provoque une perturbation du mouvement vers le bas. Cela génère alors une distension abdominale et parfois de la constipation.

Également, le Qi de la Rate peut s’effondrer et entrainer alors l’effondrement du Qi du Gros Intestin provoquant alors un prolapsus anal ou du sang dans les selles.

C’est le Qi descendant du Poumon, organe couplé, qui fournit au Gros intestin le Qi nécessaire à l’effort requis par la défécation.

Si le Qi du poumon est insuffisant, il ne peut fournir suffisamment de Qi au gros intestin pour la fonction de défécation et il en résulte la constipation.

Inversement, si une personne souffre de constipation, il peut en résulter une perturbation de la fonction de descente du poumon, et donc de l’essoufflement.

Un processus d’élimination des déchets

Selon la médecine chinoise, le couple d’organes Poumon (yin) et Gros intestin (yang) est donc associé à la saison de l’automne et à l’émotion de tristesse.

L’automne, c’est le moment où le cycle de l’énergie décline, et où les feuilles des arbres tombent et meurent. Elles sont ensuite décomposées par les pluies. Ce processus de mort est essentiel car il permet le développement d’autres formes de vie au printemps prochain.

Ce même processus est à l’œuvre dans l’être humain. Le gros intestin nous aide à nous débarrasser de l’ancien, de ce dont on n’a plus besoin. Ce processus consiste à éliminer non seulement les déchets issus du processus digestif, mais également nos déchets mentaux et spirituels. Après avoir joui de la récolte au niveau du corps, du mental et de l’esprit, on doit lâcher prise pour laisser la place à d’autres formes de vie, à l’évolution.

Les déséquilibres du Métal

Le dérèglement de l’élément Métal affecte souvent la peau. Comme les poumons, la peau représente la seule partie du corps en contact direct avec l’air extérieur (la peau « respire »). Comme le gros intestin, elle élimine des toxines via la transpiration. On trouve souvent chez les personnes avec un déséquilibre du Métal un historique lié à dermatologie : eczéma, psoriasis, dermatite, acné etc. Ou alors, de manière plus subtile, elle a la peau terne.

Poumon et gros intestin ont un impact sur la qualité de notre peau et notre état d’esprit. Selon la Médecine Traditionnelle Chinoise, le Métal nourrit par extension la peau, la gorge, l’odorat, la puissance de notre voix.

Le gros intestin permet d’éliminer et d’évacuer les déchets de l’organisme. Les problèmes liés au Gros Intestin sont le signe de notre peur de manquer, de se tromper, de lâcher prise.

Difficultés à lâcher-prise

Si notre énergie Métal est faible, alors notre lâcher-prise sera déséquilibré. Soit on évacue des choses trop tôt, soit l’on s’y accroche pendant trop longtemps.

A la mort d’un proche par exemple, il est normal de ressentir du chagrin, sentiment de nature métal. Si cette perte ne nous affecte en rien, ou si au contraire la tristesse ressentie perdure pendant des années, cela indique que l’élément Métal est en déséquilibre.

Quand on n’arrive vraiment pas à lâcher prise, chaque évènement, aussi petit soit-il, nous affecte grandement. On avance dans la vie en regardant le passé.

Un élément métal en équilibre engendre chez l’individu une prise de conscience de l’étincelle divine qui est en lui. Si cette étincelle divine en soi est coupée, cela peut mener à une résignation absolue. 

Plus rien ni personne n’a de sens ou de valeur. L’individu ne voit pas l’intérêt de prendre soin de lui-même et encore moins des autres. Il est toujours négatif par rapport à tout ce qu’il fait, il tombe dans la dépression.

D’autres essayeront de compenser ce vide en exposant une apparence parfaite. On verra alors des personnes qui prennent soin de chaque détail de leur apparence ainsi que de leur lieu de vie. Chez elles tout est à sa place, aucun fil ne dépasse, aucun brin de poussière ne fait son apparition. Elles chercheront à accumuler des richesses et à les exhiber au grand jour pour essayer de créer cette impression de valeur à travers le regard des autres.

Rééquilibrer l’énergie métal

respiration profonde

Comme nous l’avons vu, il est important de ne pas refouler la tristesse, ni de la cultiver. La méditation, la respiration profonde permettent d’apprendre à accepter nos émotions sans les laisser nous submerger. Tenir un journal peut aider aussi à lâcher certaines émotions.

Cela est d’autant plus important dans le cas de la tristesse qui est en lien avec le poumon et le gros intestin.  Ainsi, respirer longuement, profondément et consciemment peut aider à nettoyer le chagrin ou la tristesse que l’on garde en soi.

L’automne, saison associée au métal, est la saison ou les légumes-racines sont à privilégier. Il est conseillé d’augmenter légèrement la consommation d’aliments au goût acide, tels que le pain au levain, les citrons et les limes, les pamplemousses, les aliments marinés et fermentés, les poireaux, les haricots azuki, le vinaigre, le thé de cynorrhodon, le yogourt, etc. Les aliments blancs, notamment les oignons, l’ail, les navets, les radis, le daikon, le chou, la poire, etc. sont traditionnellement considérés comme protecteurs des poumons.

Les personnes souffrant de sécheresse (toux sèche, gorge sèche, peau sèche, etc.) peuvent souhaiter consommer des aliments plus humides, tels que le tofu, le tempeh, les épinards, l’orge, le millet, la poire, la pomme, le kaki, les algues, les amandes, les pignons, les graines de sésame.

Dāng Guī : usage et vertus

Dāng Guī : usage et vertus

Le « Ginseng de la femme »

Dāng Guī, ou Radix angelicae sinensis, est une plante couramment utilisée dans la pharmacopée chinoise. Herbe très polyvalente, elle trouve sa force dans le traitement des problèmes de santé des femmes, et plus particulièrement dans les carences et les stases sanguines. Souvent appelé « Ginseng de la femme » pour sa contribution indispensable à la gynécologie de la Médecine Traditionnelle Chinoise (MTC), Dāng Guī se traduit littéralement par « état de retour ». Ce nom reflète sa capacité à restaurer un état de santé.

Toutefois elle profite aux personnes des deux sexes grâce à ses diverses propriétés : réchauffante, nourrissante, humidifiante, et tonifiante. L’angélique chinoise est utilisée pour un large éventail de conditions, y compris les troubles musculosquelettiques, dermatologiques et digestifs.

Plante herbacée des climats frais

Dāng Guī est une grande plante herbacée, parfumée et vivace cultivée dans des climats frais et humides à haute altitude. On la trouve dans les provinces du Gansu, du Sichuan, du Shaanxi et du Hubei en Chine, ainsi que dans les régions montagneuses de Corée et du Japon.

La plante mesure environ un mètre de haut. Elle possède des tiges violettes rainurées, de grandes feuilles vert vif et de larges grappes plates de petites fleurs blanches qui fleurissent en été. Ce sont les racines qui sont utilisées dans la pharmacopée chinoise. Celles-ci sont récoltées à l’automne quand la plante a trois ans de croissance.

Les racines sont ensuite soigneusement nettoyées, séchées, fumées lentement et coupées en fines tranches. Les racines de la meilleure qualité semblent provenir de la province du Gansu, elles sont longues, humides et parfumées.

Bien que la racine entière soit en général utilisée, différentes parties de celle-ci sont attribuées à différentes fonctions : la tête  (Dāng Guī tou),  le corps  : Dāng Guī shen, la queue : Dāng Guī wei.

Dāng Guī est préparé de différentes façons selon l’effet que l’on veut en obtenir.

Le Chao Dāng Guī (grillé à sec) est plus chaud, plus sec et moins revigorant pour le sang, ce qui le rend plus approprié pendant la grossesse.

Le jiu zhi Dāng Guī (grillé au vin) et le cu zhi Dāng Guī (grillé au vinaigre) ont une action tonifiante sur le sang renforcée. Enfin le Dāng Guī carbonisé  (tan Dāng Guī) est plus chaud et arrête les saignements.

L'angélique chinoise, trésor de la mtc

Le Chao Dāng Guī (grillé à sec) est plus chaud, plus sec et moins revigorant pour le sang, ce qui le rend plus approprié pendant la grossesse.

Le jiu zhi Dāng Guī (grillé au vin) et le cu zhi Dāng Guī (grillé au vinaigre) ont une action tonifiante sur le sang renforcée. Enfin le Dāng Guī carbonisé  (tan Dāng Guī) est plus chaud et arrête les saignements.

Nourrit et tonifie le sang

Dāng Guī est l’une des herbes chinoises les plus populaires. Pour nourrir le sang, elle est le principal médicament de la MTC. Sa nature douce (tonifiante), tonifie le sang ; sa nature âcre et amère draine et harmonise le sang ; sa nature chaude, nourrit le sang, dissipe le froid et pénètre dans les organes qui stockent, engendrent et contrôlent le sang (le foie, la rate et le cœur).

Dāng Guī a une saveur forte, sucrée et terreuse avec un arrière-goût amer. Son arôme et son gout un peu piquant et chaud qui attaque un peu la langue rappelle son énergie revigorante.

Ainsi, Dāng Guī est inclus dans les prescriptions en cas de carence sanguine qui se manifeste par des signes et des symptômes tels : pâleur du teint, étourdissements, fatigue, peau sèche, vision floue, palpitations, acouphènes.

Il est recommandé dans tous les cas d’anémie.

Soigne les troubles menstruels

ginseng de la femme

Comme évoqué plus haut, le « ginseng des femmes » joue un rôle particulier dans la santé des femmes et notamment dans la régulation des troubles menstruels : syndrôme prémenstruel, aménorrhée, règles douloureuses ou irrégulières.

Il est généralement indiqué pour la plupart des affections gynécologiques ayant leurs racines dans une carence sanguine, en particulier celles associées à une stase sanguine et/ou au froid.

Dāng Guī est également souvent utilisé pour humidifier les intestins et soulager la constipation due à la sécheresse, qui est une conséquence courante d’une carence sanguine. Enfin, c’est un médicament précieux pour de nombreuses affections cutanées (plaies et aux abcès avec gonflement et plaies à cicatrisation lente).

La légende de Dāng Guī

la légende de dang gui, la plante du retour

Selon une légende chinoise, il était une fois un jeune couple marié qui vivait heureux. Un jour, le mari a été forcé de quitter leur maison pour prouver sa force et son courage. Il doit parcourir les montagnes pour survivre aux dangers de l’environnement et ramasser des herbes médicinales. À son départ, il a demandé à sa femme d’attendre trois ans pour son retour. Il a déclaré que s’il ne revenait pas après ce temps-là, cela signifierait qu’il n’était plus en vie et qu’elle devrait trouver un nouvel amour.

Trois ans se sont écoulés, et il n’est pas revenu, alors elle a trouvé un nouvel amour et s’est remariée. Peu de temps après, le mari est revenu. Sa femme eut le cœur brisé de s’être remariée. Son chagrin d’amour affaiblit son état, et elle tombat malade de tristesse, ne voulant plus vivre.

Lorsqu’il apprit son état, l’homme lui apporta quelques-unes des herbes qu’il avait trouvées dans les montagnes pendant son absence. Elle les mangea, espérant qu’elles seraient toxiques, mais les herbes firent le contraire, Elle retrouva la santé. Cette herbe fut alors nommée Dang (qui signifie « état de ») Gui (« retour »).

Cette histoire, illustre bien la puissance de la matière médicale de cette plante., que l’on retrouve donc dans de nombreuses préparations de pharmacopée chinoise.