Huang Di : l’Empereur jaune

Huang Di : l’Empereur jaune

Le père de la Médecine chinoise

L’Empereur Jaune, Huang Di (黃帝), occupe une place singulière dans l’imaginaire et la mémoire de la Chine. Il est aussi une figure essentielle à l’origine de la Médecine traditionnelle chinoise (MTC). En effet, la tradition lui attribue la paternité du du Huangdi Neijing (黃帝內經, Canon interne de l’Empereur Jaune), ouvrage fondateur de la MTC.

Figure semi-légendaire, il serait né au XXVIIe siècle av. J.-C., et aurait régné environ un siècle. Plus qu’un souverain, il représente à la fois un sage, un inventeur et un guide spirituel. Ses vertus en font un modèle à plus d’un titre et un personnage inspirant.

Un héros civilisateur

Selon des chroniques anciennes, telles que le Shiji de Sima Qian (Ier siècle av. J.-C.), Huang Di serait né dans la plaine de Youxiong sous le nom de Xuanyuan (軒轅). Dès son plus jeune âge, il se distingue par une intelligence hors du commun, une curiosité insatiable et un sens inné du gouvernement.

 Son règne est associé à la sédentarisation des populations, à la fondation de structures politiques stables et à de nombreuses inventions. Les traditions lui attribuent notamment l’institution du calendrier, la domestication des animaux, l’utilisation des bateaux, la mise en place de la musique rituelle, ainsi que l’invention de l’écriture grâce à son ministre Cang Jie.

Ainsi, Huang Di n’est pas seulement un dirigeant politique, mais un héros civilisateur. On dit de lui qu’il « rassembla les tribus dispersées sous un même ciel » et que « par sa vertu, il fit croître l’harmonie parmi les hommes ».

L’apport à la médecine chinoise

l'empereur jaune, Huang Di

Huang Di est considéré comme l’auteur — ou l’inspirateur — du Huangdi Neijing (黃帝內經, Canon interne de l’Empereur Jaune), ouvrage qui fait toujours référence pour la Médecine chinoise contemporaine. Bien qu’il soit improbable qu’il ait réellement écrit ce texte, la tradition lui en attribue la paternité, signe de l’autorité morale et intellectuelle qu’il représente.

 Le Neijing se présente sous la forme de dialogues entre Huang Di, l’empereur jaune, et son médecin Qi Bo. Le souverain interroge, le médecin répond ; ensemble, ils explorent la nature du corps humain, les causes des maladies et les méthodes de prévention.

Le texte (voir encadré) pose les bases de la pensée médicale chinoise : équilibre entre le Yin et le Yang, circulation du Qi (énergie vitale), rôle des cinq éléments (bois, feu, terre, métal, eau), lien intime entre l’homme et la nature : « L’homme naît de la Terre, il dépend du Ciel, et il est régi par le Dao. » 

Le rôle du médecin, selon lui, est d’abord de prévenir leur apparition : « Soigner une maladie déjà déclarée, c’est comme creuser un puits quand on a soif, ou forger des armes quand la guerre a commencé. » (Neijing, Suwen, chap. 2). Cette approche préventive, toujours centrale dans la MTC, révèle l’intelligence pragmatique et visionnaire attribuée à l’Empereur Jaune.

Vertus et personnalité

Huang Di est décrit comme un modèle de sagesse, de tempérance et de vertu. C’est un souverain qui sait écouter ses conseillers, qui respecte les lois de la nature et gouverne par l’exemple. Il suit la voie du « juste milieu » : ni excès ni carence, mais une recherche constante d’harmonie. Dans le Neijing, il insiste sur l’importance de vivre en accord avec les saisons : « Au printemps et en été, nourris la croissance ; en automne et en hiver, protège le recueillement. Celui qui suit la voie des saisons évite la maladie. »

Ainsi, Huang Di incarne une conscience écologique innée, basée sur un respect profond des cycles du vivant et de l’interdépendance entre l’homme et son environnement. Sur le plan moral, il est l’archétype du souverain sage et bienveillant, au service de son peuple. Il gouverne non par la force, mais par la vertu. Il est « le fils du Ciel qui éclaire les hommes sans les dominer ».

Héritage et postérité

L’influence de Huang Di a perduré à travers les âges. Il reste une référence dans la pensée politique, philosophique et médicale chinoise. Son culte perdure encore aujourd’hui, notamment à Huangling, dans la province du Shaanxi, où des cérémonies annuelles honorent sa mémoire.

Son héritage se mesure aussi au rôle central de la santé dans la culture chinoise. En plaçant la prévention, l’équilibre et la régulation naturelle au cœur de son enseignement, Huang Di a inspiré non seulement la médecine mais aussi la philosophie du quotidien : alimentation, respiration, pratiques énergétiques comme le qi gong.

Huang Di incarne donc un idéal intemporel : celui d’un souverain qui unit science, sagesse et spiritualité. Elle nous rappelle que gouverner, comme soigner, consiste avant tout à maintenir l’équilibre et à respecter les lois du vivant : « Le sage observe le Ciel et la Terre, comprend les souffles et protège la vie. »

Ainsi, la figure de Huang Di imprègne toujours profondément la culture chinoise d’aujourd’hui. Elle est un symbole de l’unité du peuple chinois et de la sagesse ancestrale. Son modèle continue de nourrir la pensée médicale et philosophique contemporaine chinoise.

Le Huangdi Neijing, chef-d’œuvre de la MTC

Huangdi Neijing

Le Huangdi Neijing (黃帝內經, Canon interne de l’Empereur Jaune) est considéré comme l’ouvrage fondateur de la médecine traditionnelle chinoise. Composé probablement entre le IIIe et le Ier siècle avant notre ère, il se divise en deux parties principales : le Suwen (素問, Questions simples) et le Lingshu (靈樞, Pivot spirituel). Le Suwen aborde les grandes théories médicales : Yin-Yang, Cinq Éléments, Qi, causes des maladies, prévention, diététique. Le Lingshu se concentre davantage sur la pratique, notamment l’acupuncture, en détaillant les méridiens et les points énergétiques.

La forme dialoguée entre Huang Di et son médecin Qi Bo rend l’ouvrage vivant : le souverain pose des questions pertinentes, parfois naïves, auxquelles Qi Bo répond par des explications claires et philosophiques. Ce style pédagogique reflète l’idée que la connaissance est fruit d’un échange, non d’une imposition.

Parmi les principes phares, on trouve l’idée que la santé dépend d’une harmonie dynamique entre l’homme et la nature. Ainsi, « l’homme est un microcosme reflétant le macrocosme », et ses déséquilibres traduisent une rupture avec les cycles naturels.

Encore aujourd’hui, le Neijing sert de référence aux praticiens de MTC. Il n’est pas seulement un manuel médical, mais aussi un traité philosophique, où science, spiritualité et observation empirique se rejoignent. Comme le souligne une phrase fameuse du Suwen : « Le sage ne traite pas la maladie, il traite ce qui la précède. »

Mencius

Mencius

Mencius, le philosophe du cœur humain

Dans la Chine tumultueuse des Royaumes combattants (475-221 av. J.-C.), où les royaumes s’affrontaient sans répit pour la suprématie, un homme se dressa pour défendre une idée aussi simple que profonde :

la nature humaine est fondamentalement bonne.

Cet homme, c’est Mencius, ou Mèngzǐ (372-289 av. J.-C.), considéré comme le second grand penseur du confucianisme après Confucius lui-même. Son œuvre, consignée dans le ‘Mencius’, l’un des Quatre Livres du canon confucianiste, continue d’inspirer des générations par sa foi en la bonté innée de l’homme et sa vision d’une société harmonieuse fondée sur la vertu.

Un héritier de Confucius

Né dans l’État de Zou, non loin de la ville natale de Confucius, Méncius grandit dans l’ombre spirituelle du grand maître. On raconte qu’il étudia auprès d’un disciple de Zǐ Sī, petit-fils de Confucius, s’imprégnant des enseignements confucianistes qu’il s’employa à défendre et à adapter aux réalités de son époque. À une période où la Chine était déchirée par les guerres et les rivalités, Méncius entreprit un périple à travers les royaumes, cherchant un souverain éclairé, un « sage-roi » capable d’incarner les idéaux de justice et de bienveillance. Ses dialogues avec les princes, pleins de sagesse et parfois d’audace, sont rapportés dans le Mencius, un recueil de sept livres qui porte le nom de ses principaux interlocuteurs.

Contrairement à Confucius, dont les enseignements étaient souvent austères et centrés sur les rites, Méncius aborda la philosophie avec une humanité chaleureuse, mettant l’accent sur le cœur humain. Il croyait que la bonté était une graine présente en chaque individu, prête à germer si les conditions le permettaient. Cette conviction l’opposa à d’autres penseurs de son temps, comme les disciples de Mòzǐ, qui prônaient un amour universel sans distinction, ou ceux de Yáng Zhū, qui privilégiaient l’individualisme. Méncius, lui, défendait un confucianisme ancré dans les hiérarchies sociales et les vertus morales.

Une enfance façonnée par la vertu

L’histoire de Méncius est aussi celle de sa mere, figure légendaire dans la tradition chinoise. Déterminée à offrir à son fils un environnement propice à son épanouissement, elle déménagea trois fois pour échapper aux influences néfastes. Dans un quartier de fossoyeurs, le jeune Méncius jouait à creuser des tombes miniatures ; près des abattoirs, il imitait les bouchers. Finalement, elle s’installa près d’une école, où l’enfant trouva un cadre favorable à son éducation.

Une autre histoire célèbre met en lumière la sagesse de cette mère. Un jour, voyant Méncius rentrer prématurément de l’école, elle coupa en deux un tissu qu’elle tissait avec soin. Devant l’étonnement de son fils, elle expliqua : « En abandonnant tes études, tu fais exactement comme moi : tu détruis un travail précieux. » Touché par cette leçon, Méncius retourna à ses études avec ardeur, posant les bases de sa future grandeur.

La bonté au cœur de l’homme

Au cœur de la philosophie de Méncius réside une idée révolutionnaire pour son époque : l’homme naît avec un sens moral inné. Pour illustrer ce principe, il évoque une scène universelle : si une personne voit un enfant sur le point de tomber dans un puits, son premier réflexe sera de ressentir de la panique et de vouloir le sauver, non par intérêt ou par crainte du jugement, mais par pure compassion. Cette réaction spontanée, selon Méncius, révèle la bonté naturelle de l’homme. « Sans un cœur qui compatit, on n’est pas humain », affirmait-il, faisant de la compassion, de la honte, de la modestie et du discernement les quatre piliers de l’humanité.

Pour Méncius, la moralité distingue l’homme de l’animal. Mais cette bonté innée peut être étouffée par un mauvais environnement ou des circonstances défavorables. L’éducation, dès lors, ne consiste pas à imposer des règles strictes, mais à cultiver ces vertus naturelles, comme un jardinier prend soin d’une plante sans la forcer à pousser. Il illustre cette idée avec la parabole de l’homme de Sòng, qui, impatient de voir ses pousses croître, les tira vers le haut et les détruisit. Forcer la nature humaine, c’est la détruire ; l’éducation doit être patiente et respectueuse du rythme de chacun.

Une vision politique humaniste

Méncius ne se contentait pas de réfléchir à l’individu : il voulait transformer la société. Dans une époque marquée par les guerres et l’égoïsme des dirigeants, il plaidait pour un gouvernement bienveillant, guidé par la vertu.

Un souverain, selon lui, tire sa légitimité du « Mandat du Ciel », mais ce mandat se manifeste à travers le soutien du peuple. Un roi qui néglige le bien-être de ses sujets perd cette légitimité, et le peuple a le droit de se révolter, voire de le renverser.

Cette idée audacieuse, presque révolutionnaire, faisait de Méncius un penseur politique d’une modernité saisissante.

Il exhortait les souverains à gouverner par l’exemple, en cultivant la vertu et en éduquant leur peuple. Un État prospère, selon lui, repose sur des citoyens moralement éduqués, capables de compassion et de droiture.

Malheureusement, les princes qu’il rencontra, plus préoccupés par la guerre que par la paix, restèrent sourds à ses appels. Déçu, Méncius se retira pour se consacrer à l’enseignement, formant des disciples dans une école privée où il transmit ses idéaux.

Un héritage intemporel

Mencius

“ Celui qui va jusqu’au bout de son coeur connaît sa nature d’homme. Connaître sa nature d’homme c’est alors connaître le ciel.”

Le Mencius, avec ses dialogues vivants et ses anecdotes accessibles, demeure une œuvre majeure de la pensée chinoise.

Traduit en français par des érudits comme Guillaume Pauthier ou André Lévy, il continue d’inspirer par sa foi en la bonté humaine et son appel à une société juste. En Corée, où il est appelé « Maeng-ja », et au Japon, où il est connu sous le nom de « Mǒshi », son influence perdure dans l’éducation et la culture.

Méncius nous rappelle que la moralité n’est pas une contrainte extérieure, mais une force intérieure qui ne demande qu’à s’épanouir.

Dans un monde souvent chaotique, son message résonne encore : croire en la bonté de l’homme, c’est ouvrir la voie à un avenir meilleur. Comme une plante bien cultivée, l’humanité peut fleurir si on lui donne l’amour, la patience et les soins qu’elle mérite.

Brigitte Prud’hon

Brigitte Prud’hon

Un chemin de guérison

Brigitte Prud’hon est née en France en 1962. Elle commence sa vie professionnelle dans des emplois de bureau, principalement comme assistante de direction. Elle travaille ensuite comme secrétaire de rédaction dans la presse écrite après une formation de reconversion.

À l’âge de 40 ans, sa vie prend un nouveau tournant. C’est le moment où elle rencontre Dominique. Ensemble, ils commencent une recherche approfondie sur l’être humain dans toutes ses dimensions. Ils effectuent ensemble le pèlerinage de Compostelle, une expérience magnifique qui laissera une empreinte inoubliable dans sa vie.

Ils quittent alors la vie sédentaire pour partir vivre et voyager en camping-car. C’est sur ce chemin qu’en 2004 ils découvrent leur maître Henli Röder. Ils décident d’étudier avec lui la médecine chinoise, l’art martial et le qi gong.

Depuis toujours, Brigitte est curieuse de l’être humain. Elle s’est beaucoup intéressée à la psychologie pour mieux comprendre la psyché humaine, et avant tout en apprendre davantage sur elle-même. Souffrant de dépression et d’un mal-être profond pendant des années, elle a effectué de nombreuses thérapies, et pris de nombreux médicaments chimiques, sans vrai succès.

C’est au long de ce parcours entamé avec Dominique sur Compostelle, puis poursuivi avec son maître en Hollande, qu’elle trouvera enfin la guérison.

Brigitte a toujours été passionnée par la cuisine, les plantes et la nature. Elle s’intéresse également au Feng Shui, en tant que complément précieux à la médecine chinoise. Elle pratique aussi la guitare classique.

De  nature bienveillante et sensible, elle aime plus que tout aider les gens à être en meilleure santé, et à découvrir leur chemin vers le bonheur et la vraie liberté.

Souvenirs de stage à Ha Noi